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Prédateurs du Parc National du Niokolo-Koba, Sénégal, mai 2018
Compte-rendu d’une visite de Thomas Clode, guidé par Abdoulaye Kanté
Mis en ligne : mardi 2 juin 2020

Dès mon plus jeune âge j’ai été fascine par les chiens sauvages africains (Lycaon pictus) et j’ai toujours gardé un œil attentif sur les rapports de leur répartition à travers l’Afrique. Comme bien des magnifiques espèces de prédateurs dans cette partie du monde, leur population et leurs aires de répartition ont rétréci notablement, même depuis le début des années 2000.





Au fil des années j’ai vu les rangs de ce charismatique animal se réduire de vastes étendues en Afrique à des poches isolées.

En Afrique de l’Ouest en particulier, ce mammifère qui errait relativement librement dans cette région, de la côte atlantique aux montagnes de l’Algérie et jusqu’aux forêts équatoriales, est maintenant coincé dans le dernier bastion sauvage de l’extrême ouest de l’Afrique, le Parc National Niokolo-Koba (PNKK) au Sénégal.

J’ai trouvé les guides de Niokolo-Koba par leur site Web en 2016 ce qui m’a permis d’obtenir une information chaleureuse et détaillée, d’abord par Ousmane Baté, puis par Abdoulaye Kanté. Réunir des informations sur le parc fut relativement simple avec leur aide et après quelques faux départs j’arrivai au Sénégal en mai 2018, impatient d’arriver à photographier les derniers survivants de chiens sauvages en Afrique de l’Ouest. Une grande aventure m’attendait !

Abdoulaye avait travaillé dur pour organiser la logistique avant mon arrivée, le coût de mon voyage avait été réglé à l’avance via Western Union (un procédé facile). Je fus accueilli au nouvel aéroport de Dakar par Abdoulaye, qui avait prévu une voiture et un chauffeur parlant anglais pour tout mon séjour. Le voyage lui-même de Dakar au Sud-Est du Sénégal fut très facile, même en comptant un petit problème de voiture, et en début de soirée nous étions arrivés à un confortable hébergement juste à l’extérieur du Parc.

Notre véhicule

Le matin suivant, conduisant à travers le Parc, nous avons observé plusieurs des nombreuses espèces qui habitent le PNNK : le très beau kéwel (guib harnaché de l’Afrique de l’Ouest), nombreux cobe defassa, cobe de Buffon, ainsi que beaucoup de crocodiles et d’hippopotames le long du fleuve Gambie.

Kéwel
Beaucoup de crocodiles

Notre première nuit dans le Parc se passa au Campement du Lion, géré par la coopérative des guides du PNKK. Les personnes habituées au luxe de l’Afrique de l’Est et du Sud devraient revoir leurs attentes si elles se rendent au Campement du Lion, car on est vraiment dans la nature là-bas. Pas d’eau courante ni d’électricité (à présent l’électricité a été installée), mais les huttes sont confortables et la nourriture très bonne (poissons du fleuve Gambie proche). Le camp est situé au cœur du pays des lions où l’on a une réelle chance de voir un des quelques représentants de cette espèce restants en Afrique de l’Ouest.

Le matin suivant, Abdoulaye nous conduisit au poste des rangers à Lingue-Kountou, plus loin au sud-est et plus profond dans le parc. Cette région est connue pour être fréquentée par les chiens sauvages qui traversent la région aride au nord de la rivière Niokolo-Koba pour boire, matin et soir, à la rivière.

Rivière Niokolo-Koba

Nos matinées et soirées durant la semaine suivante se passèrent à accompagner les rangers dans leurs patrouilles dans les zones avoisinantes, ce qui fut fascinant et très agréable. Nous visitâmes un certain nombre de tanières utilisées auparavant par les chiens sauvages, et dans nos déplacements nous tombâmes sur des hyènes tachetées, des servals, des chacals à flancs rayés ainsi que les omniprésents phacochères, babouins et céphalophes à flancs roux. Il y avait des traces évidentes de prédateurs partout, nous avons rencontré régulièrement des empreintes de lions et des traces de léopards. Avec excitation, lors d’un raid vers la rivière, nous croisâmes une zone desséchée qui avait gardé une empreinte claire de chien sauvage de la saison humide précédente, signe que les chiens étaient dans les environs.

Nos soirées à Lingue-Kountou furent fantastiques, dormant à la belle étoile sous des cieux clairs, bavardant avec les rangers dans mon français limité à propos du football que nous écoutions à la radio et les accompagnant pour des dîners terriblement épicés de poisson et de riz.

Abdoulaye organisa une excursion d’une journée plus loin dans le sud-est jusqu’au Mont Assirik pendant que nous étions au Lingue-Kountou.

La région du Mont Assirik est connue pour héberger une population de chimpanzés de savane, d’élands de Derby et les derniers éléphants du Sénégal. Notre voyage fut impacté par une chaleur incroyable (48 degrés Celsius selon notre estimation) mais nous étions tout de même capables d’apprécier la beauté du plateau du Mt Assirik. Inimaginable, nous avons croisé une empreinte d’éléphant en route pour Assirik - on pense qu’il ne reste que 3 éléphants au Sénégal, donc tomber dessus serait vraiment quelque chose d’extraordinaire.

Après notre excursion à Assirik nous nous sommes basés à nouveau dans la zone de guet autour du Camp du Lion.

De là nous avons fait plusieurs excursions d’une journée vers le Grand Mirador, un magnifique point de vue d’où les rangers avaient aperçu récemment une bande de plus d’une douzaine de chiens. Nous passâmes plusieurs heures là-bas et croisâmes des buffles, des bubales roux et des quantités des kobas (hippotragues rouans). La zone était également couverte de traces de chiens sauvages et de léopards, témoignage de la population de prédateurs à cet endroit.

Buffle
Koba

Lorsque nous n’étions pas au Mirador nous fréquentions le circuit principal passant par différentes mares qui attirent les oiseaux et les mammifères. C’est là que notre observation la plus belle survint : lorsque nous roulions lentement le long de la piste un léopard surgit des buissons devant nous et traversa la route, s’évanouissant avant que je puisse même lever ma caméra. J’ai compris que l’observation de léopards était une rareté dans le PNNK, et c’est donc une rencontre que je chéris.

Il devint évident dans les jours qui suivirent que trois lions mâles vivaient également dans la région, nous pouvions entendre leurs rugissements depuis le camp pendant la nuit, et leurs immenses traces étaient facilement visibles sur les pistes près du camp. Nous passâmes plusieurs heures à essayer de les situer mais ils se sont toujours arrangés pour nous échapper - plusieurs autres touristes les ont croisés et il est donc très possible de les trouver !

Nos soirées au Campement du Lion se passèrent à profiter de la vue de ratels, de civettes et même de la vue d’un léopard, lorsqu’ils qu’ils passaient par le camp.

Ratels

Je recommande absolument à quiconque ayant l’esprit d’aventure de visiter le Niokolo-Koba. En particulier quiconque souhaitant avoir une chance de croiser la très rare population de chiens sauvages d’Afrique de l’Ouest, lions, léopards, éléphants, élands de Derby et chimpanzés devrait avoir le Niokolo-Koba en tête de sa liste de projets.

Je suis sûr d’y retourner bientôt, en particulier puisque les chiens ont été vus régulièrement par les guides du PNNK (5 fois entre novembre 2019 et janvier 2020 !).